mardi 19 mai 2009

M77 - Maxïmo Park : "Quicken The Heart"

Maxïmo Park, ou l'histoire d'un espoir déçu.
Un de plus...


On les avait adorés sur A Certain Trigger, armés de titres brillants comme "Apply Some Pressure" ou "Graffiti", puis on les avait un peu zappés avec leur deuxième album, Our Earthly Pleasures, une resucée de leurs premiers ébats, la saveur et l'inspiration en moins. Et aujourd'hui, revoilà une troisième fois Maxïmo Park pour un Quicken The Heart qui, hélas, poursuit sur cette pente descendante.

À l'image des Rakes, la bande du sympathique Paul Smith (le chanteur, pas le couturier) ne parvient guère à se renouveler et s'enlise dans une pop/rock so british sous l'influence d'un post-punk blafard. L'écoute de Quicken The Heart d'un bout à l'autre est longue et monotone. Maxïmo Park nous abreuve de guitares tantôt sautillantes, tantôt rageuses, de claviers vintage, de chœurs en "ohoho" et de rythmiques simplistes cherchant juste à faire monter la pression avant le refrain. Le plus triste, c'est que, cette fois-ci, aucune chanson ne sort du lot. Autant Our Earthly Pleasures profitait de 2-3 réussites comme "Girls Who Play Guitars" ou "Books From Boxes", autant ce nouvel album est désespérément lisse et ennuyeux. Les 12 morceaux qui le constituent s'enchainent comme autant de clones dénués de personnalités. Cela donne plus de 37 minutes d'un rock pataud qui est toujours à la recherche des mélodies lumineuses que pouvait concocter Maxïmo Park il y a déjà 4 ans (aaah "Going Missing", quand auras-tu un digne successeur ?).
Mais la plus grande déception reste le chant de Paul Smith, qui n'est absolument pas mis à profit. Pourtant reconnaissable entre mille, doté d'un charisme rare, il se cantonne ici au rôle du gentil petit garçon qui récite le poème que la maîtresse lui a demandé d'apprendre, en plaçant quelques intonations en fin de vers pour ne pas paraître monocorde. La folie et la gouaille de l'époque de A Certain Trigger n'étant plus de la partie, sa voix perd tout son cachet.

En fait, Quicken The Heart déçoit d'autant plus que le souvenir de ce premier album irréprochable est encore bien présent dans nos oreilles. Et une réécoute de A Certain Trigger abaisse encore plus l'estime accordé au dernier album de Maxïmo Park car il témoigne de la capacité de ce groupe à faire bien mieux.
Il faut donc souhaiter aux anglais de retrouver l'inspiration et la spontanéité de leurs premiers exploits. En effet, si Quicken The Heart n'est pas fondamentalement un mauvais album (il reste tout de même largement écoutable), il souffre avant tout d'un manque certain d'engagement et de prise de risque de la part du groupe. Alors que les Rakes avaient bien compris qu'à défaut d'inventer l'eau chaude, ils pouvaient donner tout ce qu'ils avaient dans un rock énergique, Maxïmo Park est devenu bien mollasson.

Verdict : 2,25/5


"The Kids Are Sick Again"

Myspace

vendredi 8 mai 2009

M76 - Bloc Party : "Intimacy Remixed"

Notre album favori de 2008 passe à la moulinette !


Comme pour leur premier opus, Silent Alarm, on a droit à une version revue et corrigée du dernier album de Bloc Party, Intimacy, reprenant le tracklisting de l'original mais où chaque titre se voit remixé par des gens plus ou moins connus. Déjà à l'oeuvre sur Silent Alarm Remixed, on retrouve par exemple Mogwai et Phones qui nous donnent cette fois-ci leurs versions de "Biko" et "Talons". Cependant, le casting est majoritairement renouvelé et des petits nouveaux sont venus apporter leur coup de scalpel, comme Hervé, We Have Band ou No Age, de jeunes groupes qui ont fait parler d'eux ces derniers temps.

Différents types de relectures se détachent. Tout d'abord, il a ceux qui ont opté pour une version dancefloor efficace et sans bavure, à l'image des Villains et de leur version coup de poing de "Ares". Généralement, rien de bien original dans cette veine-là mais quelques jolies réussites. Alors que le "Mercury" de Hervé est délicieusement sombre et acide à souhait, Armand Van Helden impressionne avec sa version revue et corrigée du mélancolique "Signs". À l'image du clip tourné pour l'occasion, ce remix chaudard fleure bon le vice et apparait comme la face cachée et obscure du titre d'origine. Phones (aka Paul Epworth, producteur du groupe) offre de son côté une superbe interprétation de "Talons". On pense à Calvin Harris pour l'influence disco mais à MSTRKRFT pour les basses ronflantes ou aux Daft Punk pour les voix samplées à l'extrême. Un cocktail sympathique pour un des titres forts de cet Intimacy Remixed.

Deuxième variation possible : celles qui se contentent de reprendre l'atmosphère des morceaux de départ. C'est le cas par exemple de "Zephyrus" et "Biko" remixés respectivement par Phase One et Mogwai. Malheureusement, dans les deux cas, cela manque profondément d'inspiration, un peu à l'image (et ça n'est sûrement pas un hasard) du derniers album des post-rockeurs écossais, The Hawk Is Howling. En revanche, le remix de "Your Visits Are Getting Shorter" par Optothetic se présente comme une sympathique extension d'un morceau initialement très réussi mais qui ne paraissait toutefois pas aller au bout de son potentiel, ce qui semble désormais rectifié.

Enfin, certaines chansons se voient totalement déportées vers d'autres horizons musicaux. C'est le cas par exemple de "Trojan Horse" qui, grâce à John B, carbure désormais au drum'n'bass et s'étale à present sur 7 minutes (le double d'origine !) de pure transe électronique. "One Month Off" subit également une belle transformation sous la main des Filthy Dukes. Les sonorités synthétiques ont remplacé les riffs électriques et les claviers se chargent désormais de faire monter l'adrénaline. On pourra également citer les prouesses de Gold Panda sur "Letter To My Son" ou encore l'appropriation totale de "Better Than Heaven" par No Age. Il y a cependant une ombre au tableau, et pas des moindres : c'est le massacre de "Ion Square", le morceau le plus abouti de Intimacy, par Banjo Or Freakout. Plus aucune émotion ne subsiste, seuls restent des vrombissements sans consistance. Une honte.

Au final, si Intimacy, version d'origine, donnait l'impression par moment d'être déjà une version remixée, cette nouvelle mouture parvient tout de même à donner un nouveau souffle à ce disque qui aura fait moins de bruit qu'il ne l'aurait mérité. Séance de rattrapage donc avec cette fournée de remixes dans l'ensemble assez réussis.

Verdict : 3,5/5



"Signs" (Armand Van Helden Remix)

Myspace (sur lequel est proposé un sympathique concours de remixes)

vendredi 1 mai 2009

M75 - Krazy Baldhead : "The B Suite"

Un peu d'étrangeté dans ce monde de clones.


Un nouveau signé chez Ed Banger. Enfin, nouveau est un bien grand mot, il était sur les trois premiers volumes de Ed Rec. Bon, c'est son premier album chez Ed Banger en tout cas ! Et, alors que Justice, SebastiAn et Mr Oizo se chargent de distiller le "pur son Ed Banger French Touch trop hype dans votre Hyper et sur votre radio toujours première dans votre département (quelque soit votre département)", eh bien pendant ce temps-là, Krazy Baldhead concoctait un album digne de ce nom. Pour que vous situiez un peu, Krazy Baldhead c'est en quelque sorte le "pari de Pedro Winter sur un mec à la limite de l'expérimental". Oui, parce que Pedro ce qu'il veut c'est "être le catalyseur de la nouvelle French Touch", et Krazy Baldhead c'est un peu l'électron libre du label.

L'album est composé de quatre mouvements (je n'arrive pas à savoir si c'est de la dérision ou pas) de quatre parties chacun sauf le dernier qui en compte cinq.
Quatre mouvements donc comme quatre longs morceaux qui passent chacun par des influences différentes.

Le premier commence par des violons inquiétant un peu façon Philip Glass, et puis les synthés prennent le dessus petit à petit jusqu'au début du deuxième morceau où le rythme devient beaucoup plus hip-hop. C'est là d'ailleurs, je crois, la force de Krazy Baldhead : passer d'un style à l'autre presque sans qu'on ne s'en rende compte et sans perdre son style propre. Dans le troisième morceau, on repart vers quelque chose de très électro, toujours avec les mêmes instrus mais agencés autrement. Le morceau retient notre souffle avec un rythme de locomotive jusqu'au quatrième où ce même rythme est cassé comme s'il commencait à arriver en bout de course. D'ailleurs, il disparait presque pendant un moment, le temps que les synthés se mettent à tourner en boucle. On sent la fin de ce mouvement arriver : les instrus s'arrêtent les uns après les autres, le rythme ralentit.

D'ailleurs, un semblant de musique de film type espionnage commence. Mais ça ne dure pas c'est rapidement remplacé par des trompettes jazz. On se retrouve sur le deuxième morceau du mouvement. On s'en rend compte quand on entend quelqu'un chanter, on regarde : "ah oui, c'est un morceau avec Tes ". Ça prend des allures hip-hop/jazz et évoque le premier album des Birdy Nam Nam. Les morceaux passent très vite et on se retrouve sans s'en rendre compte au quatrième morceau du mouvement. Le rythme ralentit, les trompettes jouent en solos. Je ne sais pas si c'est parce que je l'ai trop écouté, mais cette fin de morceau a l'air un peu attendue et plus ou moins originale...

Le troisième mouvement commence par "niaaaaa" genre zen (oui oui) sur lequel s'ajoute un rythme et, se rapprochant, un synthé aigu qui joue une mélodie qui fait penser aux voix façon Dan Deacon. Mais ça n'est qu'une intro car très vite Big-O et Mlle Yulia s'imposent avec un flow énergique et même énergétique tellement il donne envie de bouger. Ne reste que le rythme saccadé du début et parfois la mélodie (juste sur Big O). Et puis, même schéma, un espèce de dégradé ou alors de fondu enchainé nous amène au morceau suivant. Des bruits bizarres, comme des interférences et une mélodie du même type jusqu'au milieu du morceau où on crois un autre morceau arriver alors qu'en réalité, c'est toujours le même. Ensuite arrivent des voix un peu christiques MAIS au vocodeur (!) : c'est rigolo. Elles introduisent un featuring avec Outlines. Des guitares vocodées elles aussi, des effets sur le treble : un morceau étrange aux influences pop (un peu à la Yuksek) et hip-hop. Ce morceau finit à merveille le troisième mouvement.
Le quatrième et dernier mouvement est surement le meilleur de l'album, un mélange Birdy Nam Nam (d'avant)+Kavinsky+Boyz Noise mais dans une ambiance inquiétante. C'est surprenant...
Je vous laisse le plaisir de l'apprécier vous même !

Finalement, Krazy Baldhead ne se laisse pas enfermer par ses influences (ô combien différentes). Au contraire, il en joue et les manipule presque à la perfection.


Verdict : 4/5


Krazy Baldhead, Sweet Night, “The B-Suite” (Ed Banger)


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