samedi 28 mars 2009

M69 - Peter Von Poehl : "May Day"

Un bijou de musique pop.
Envoûtant et délicat.




Peter Von Poehl, suédois résidant simultanément à Paris, Berlin et Stockholm, a longtemps été un de ces artistes discrets, guitariste au service des autres (pour Bertrand Burgalat, Alain Chamfort, Vincent Delerm, Birdy Nam Nam ou bien au sein du groupe A.S. Dragon. Ce n'est qu'en 2006 qu'il s'est lancé dans une aventure solo avec son premier album Going Where The Tea-Trees Are, un album de pop intimiste qui lui a permis de jouer en première partie de groupes comme Air ou Phoenix.

On le retrouve donc en 2009 avec son deuxième album, May Day. Et les fondements n'ont guère changé : Peter Von Poehl possède toujours ce timbre envoûtant et ce sens inné de la mélodie, celle qui vous transporte en l'espace de deux simples notes. Toutefois, alors que son premier opus pêchait parfois par manque de minutie ou au niveau de la production, celui-ci se révèle bien plus travaillé et fignolé. Les arrangements ne sont plus aussi minimalistes et chaque piste profite d'une instrumentation autrement plus complexe que ce que le suédois nous avait offert jusque là.

Et cela s'entend dès la première piste ! "Parliament" est un beau morceau d'introduction, plutôt rythmé, où s'entrecroisent piano, synthés, cuivres et violoncelles et sur lesquels vient se poser la superbe voix de Peter Von Poehl. Le ton est optimiste et on a tout de suite le sourire à l'entame de cet album.

Pour autant, l'ensemble de l'album n'est pas aussi joyeux et ce n'est pas plus mal. Si les pistes ensoleillées sont plutôt réussies ("Moonshot Falls", "An Eye For An Eye"), Peter Von Poehl n'est jamais aussi bon que lorsque qu'il chante avec mélancolie, sur ces mélodies dont il a le secret. Ainsi "Forgotten Garden", "Mexico", "May Day" ou encore "Lost In Space" sont de toutes beauté. C'est sur ses pistes que les progrès du suédois sont les plus flagrants : non content d'apporter son jeu de guitare raffiné, Peter Von Poehl a muni ces morceaux d'une multitude d'instruments qui contribuent tous à créer des ambiances uniques. Si "Lost In Space" retranscrit à merveille cette sensation de solitude au travers de ses claviers et ses chœurs aériens, "Mexico" et "May Day" profitent eux d'une basse très sonore sur laquelle se posent respectivement des cordes et un joli ensemble piano/cuivres. Ajoutez à cela que la voix du suédois est d'une justesse sans faille et vous obtenez des trésors de musique pop, un travail d'orfèvre. On retiendra également "Silent As Gold" : deux minutes et demi totalement habitées par la guitare acoustique du suédois et sa voix, plus angélique que jamais.


Ayant retenu les erreurs d'un premier disque au souffle court, Peter Von Poehl rectifie donc le tir avec May Day, un album intelligemment produit, tout en finesse et délicatesse, et qui ne souffre d'aucun point faible. Une jolie performance qu'on a hâte de voir sur scène (rendez-vous fin juillet pour son concert à Arles aux côtés de Peter Doherty).


Verdict : 4/5



"Parliament"

Myspace

mardi 10 mars 2009

Live Report 05 - Orange Odyssée

Orange Odyssée, ça vous dit quelque chose?

Si la réponse est oui, je me dois de vous adresser toutes mes félicitations étant donné que ce jeune groupe liégeois n'a encore sorti qu'une démo.
Si la réponse est non, il vous faut absolument réagir et pour ce faire, rien de tel qu'une petite présentation de ce groupe qui me tient tout particulièrement à cœur pour diverses raisons !

Orange Odyssée est composé de 3 membres (tous complètement accros à la musique): Hadrien Panelli (ou Billy Ray pour les intimes ...) à la batterie, Victor-Emmanuel Boinem au synthé et Quentin Remi à la basse. Maintenant que les présentations sont faites, on peut passer au plus important : la musique !

Premièrement, ne pas vous fier qu'à leur myspace, si vous en avez l'occasion (et je sais qu'il y a des belges qui nous lisent) allez (que dis-je, foncez !) les voir, vous ne le regretterez pas. La preuve fut encore donnée samedi soir où il parvinrent à conquérir la quasi totalité de l'auditoire avec une simplicité déconcertante ! Il faut aussi savoir que les live d'Orange Odyssée sont assez particuliers dans le sens où une très grande partie est laissée à l'improvisation. Cet aspect nous permet de découvrir l'univers aussi varié et improbable qui influence nos 3 liégeois (imaginez un instant ce que donnerait un habile mélange entre Superpitcher, Squarepusher et Battles par exemple). Univers dans lequel ils parviennent à nous transporter durant leur live, j'ai même cru avoir Squarepusher devant moi à certains moments, c'est vous dire !

Ensuite, je mentirais si je disais que je n'avais pas ramassé une grosse claque en les voyant ce week-end. Ces 3 gaillards arrivent à trouver la mélodie qui collera parfaitement à la ligne de basse lancée à tout hasard par un Quentin Remi planant sur des nuages minimalistes ou encore à une mélodie improbable lancée par un Hadrien Panelli déchainé!

Malgré le fait que leurs improvisations deviennent un peu n'importe quoi par moment, il n'en demeure pas moins qu'il y a une recherche derrière chaque morceau (ou partie de morceau) où il est possible de retrouver leurs nombreuses influences.

Je vous invite donc, dans un premier temps, à découvrir leur univers sur leur myspace.
Avis aux amateurs de minimales, d'expérimentale ou juste curieux de découvrir un jeune groupe prometteur, Orange Odyssée est pour vous!

Myspace

Ps: et ils ont même une page facebook: ici

lundi 9 mars 2009

M68 - The Prodigy: "Invaders Must Die"

The Prodigy est de retour et le moins que l'on puisse dire, c'est que ça arrache sa maman !




5 ans après Always Outnumbered Never Outgunned, les 3 anglais nous reviennent avec un nouvel opus, leur cinquième officiel.
Il est impossible (ou presque) de ne pas connaître The Prodigy tant ils furent une machine à tubes (citons, par exemple, le cultissime "Smack My Bitch Up", le grandiose "Firestarter" ou encore l'improbable "Poison") dans les années 90. Du coup, difficile de partir sans apriori pour faire une critique correcte de ce monstre du Big Beat ... mais je vais quand même essayer de faire de mon mieux.

Bref, trêve de bavardage, l'album commence avec le titre éponyme : "Invaders Must Die" qui propose un beat puissant à souhait et une superbe intro ... On croirait même, à l'écoute des 25 premières secondes que les 3 cinglés se sont assagis mais, heureusement, ce n'est pas le cas. Vient ensuite le premier single de l'album, "Omen". Pas de doute, c'est bien du Prodigy : une voix sortie de nulle part hurlant "Omen", des beats de folies et un rythme imparable ... les anglais n'ont rien perdu de leur talent. On regrettera juste les bruits de clochettes au milieu du morceau qui, à mon humble avis, cassent tout ... enfin ne gâchons pas notre plaisir, ce début d'album a presque tué mes craintes que ce dernier opus soit aussi mauvais que le dernier des Chemical Brothers

Vient maintenant, selon moi, LE meilleur morceau de l'album: "Thunder". Évidemment, rien de bien transcendant, ça reste du Prodigy et la base est là mais sur ce morceau, il y a ce petit quelque chose d'inexplicable qui vous emporte loin ! En tout cas, la voix (semblable à celle du mythique "Out Of Space") est parfaitement posée sur la mélodie aux allures de reggae par moment (si si j'vous jure, de vrais gue-din ces anglais)!

"Colours" et "Take Me To The Hospital" viennent nous confirmer que les vrais Prodigy sont de retour, que leur précédent album n'était qu'une mauvaise blague ! Les 3 anglais sont enfin de retour et font taire les mauvaises langues affirmant que le groupe ne valait plus rien depuis le départ de Leeroy Thornhill. Certes, aucun titre n'arrive réellement au même niveau que "Pandemonium", "Narayan" ou encore "Charly" mais au moins, ils prouvent qu'Always Outnumbered Never Outgunned n'était qu'une bien triste erreur de parcours !

Passons au morceau suivant, "Warriors Dance" qui, durant les 50 premières secondes, nous fait redouté le pire avec un refrain digne de... David Guetta ! Mais fort heureusement, les sons rajoutés en fond rassurent malgré l'horrible voix de la chanteuse.

Le gros problème avec cet album, c'est qu'à partir de la moitié, on a l'impression que toutes les pistes sont semblables... aux anciens titres qui firent la gloire du groupe début des années 90. le plus bel exemple est sans aucun doute "World's On Fire". À son écoute, on a la fâcheuse impression d'entendre un edit de "Everybody's In The Place" tant la mélodie, le refrain et les voix sont sensiblement les mêmes ! Dans le genre inutile, on aussi droit à une reprise de "Omen" qui n'apporte strictement rien à l'album.
Pour les 4 derniers morceaux, je ne ferai qu'un simple paragraphe étant donné qu'ils n'apportent pas grand chose à l'album en restant néanmoins de bons morceaux dans la lignée directe des premières pistes.

Pour conclure, on peut, sans hésiter, dire que cet album est celui d'une renaissance qu'on attendait depuis maintenant 5 longues années, celui qui surclasse définitivement les Chemical Brothers, celui qui donne envie de voir The Prodigy en live (je vous le dis, tout de suite, vous aurez droit à un joli live report de leur performance à Werchter cet été).

Verdict: 3,75/5


"Thunder"

Myspace

mercredi 4 mars 2009

M67 - U2 : "No Line On The Horizon"

Les partisans du "c'était mieux avant" vont encore gagner...
Faut dire qu'avec un album comme ça, U2 ne fait qu'apporter de l'eau à leur moulin.


C'est toujours difficile de donner son avis sur un album de U2. En effet, le groupe irlandais fait désormais partie du paysage culturel mondial depuis bien longtemps, à un tel point que nous sommes tous un peu imprégnés (certain plus que d'autres) de leur musique. Chacun d'entre nous a déjà entendu maintes fois "Sunday Bloody Sunday", "With Or Without You" ou "One", si bien qu'il est aujourd'hui difficile d'avoir un point de vue objectif sur ce qu'a pu produire U2 par le passé. Alors quand un nouveau disque de Bono et ses compères voit le jour, ce n'est pas sans apriori (favorable ou non) que l'on va l'écouter. Néanmoins, l'annonce de la sortie de No Line On The Horizon suscitait en moi un optimisme aveugle, à peine terni par le souvenir des deux précédents albums sur lesquels U2 se contentait de faire le job sans prendre aucun risque.

Malheureusement ici, le problème est similaire, bien que le groupe se soit démené pour donner l'illusion qu'il voulait "se mettre en danger". Avec les habituels Brian Eno, Daniel Lanois et Steve Lillywhite aux manettes, U2 a fourni tous les efforts nécessaires pour laisser penser au plus grand nombre que cet album serait expérimental et novateur. Mais en fait, No Line On The Horizon ne recèle aucune invention musicale... Au contraire, il donne plutôt l'impression que Bono, The Edge, Adam Clayton et Larry Mullen Jr ont passé les 20 dernières années dans un bunker, sans jamais écouter ce qui pouvait se faire comme nouvelles musiques dans le monde. Et le résultat frise souvent le ridicule...

... comme les "ohaohaohaouuuuu" du titre éponyme et introducteur, "No Line On The Horizon". Dommage, le reste du morceau se laissait écouter sans déplaisir : guitare frondeuse, synthés Eno-esques et la voix de Bono qui partait pas encore trop en vrille. Vraiment dommage.
Arrivant tout de suite après, l'intro de "Magnificent", sans aucun doute concoctée par Brian Eno, rassure l'auditoire ! Une rythmique martiale, des échos de basses grisants, et des claviers que n'auraient pas renié New Order amorcent une envolée de guitare électrique du plus bel effet. Là, pour le coup, on est vraiment heureux : Larry Mullen Jr, Adam Clayton et The Edge de nouveau au top ! Seulement, alors qu'on aurait bien aimé profiter de cette belle instrumentation plus longtemps, le dernier comparse, Bono, vient nous hurler un pathétique "MA-GNI-FI-CENT !! OHOH-OHOOOH !". Et en plus il remet ça plusieurs fois pendant le morceau ! Mais rassurez-vous, cela ne l'empêche pas d'être vraiment réussi et parvient à rappeler, à défaut tout de même d'égaler, le U2 de la période The Joshua Tree.
Retour sur terre avec "Moment Of Surrender" qui étale sur sept longues minutes ce que U2 peut faire de plus ridicule. Si le synthé du fond sonore est directement recyclé des expérimentations (plus ou moins réussies) qu'a tenté le groupe avec Brian Eno sous le nom de Passengers en 1995, Bono en fait trop, élevant la voix toutes les deux phrases quand il ne les entrecoupe pas de "oohooohoohooo", et les chœurs du refrain (raté) sont ridicules. Et ne parlons des mélodies faciles au piano et à la guitare qui sont une insulte au talent de The Edge. Comble du bonheur (irony inside), Bono nous fait le plaisir de mettre fin à ce titre sur ses désormais récurrents "oohooohoohooo". Merci Bono, fallait pas. Surtout que tu remets ça sur "Unknown Caller" quelques secondes plus tard ! D'ailleurs, à la fin, on voit bien que toi aussi ça commence à te lasser, tu laisses The Edge finir le boulot pendant que tu reprends ton souffle. De fait, le morceau se finit sur un interminable solo de guitare, peu inspiré, et ponctué par des cuivres tout à fait pathétiques.

"I'll Go Crazy If I Don't Go Crazy Tonight" ne contient toujours pas ces fameuses innovations qu'on attend toujours... Au contraire, on a juste droit à un banal morceau de pop à la U2. Un auto-plagiat même pas réussi. Plus de "oohooohoohooo" dans ce coin-là, mais en revanche, une belle soupe commerciale en bonus. Oh ! Mais qu'est-ce qu'on entend ensuite ? Un riff de guitare bien gras ? Tiens, ça pourrait être une bonne idée ça ! C'est exactement ce qu'ont dû se dire aussi nos quatre irlandais. Sauf qu'au final, ça donne "Get On Your Boots" qui est vraiment insipide. Des paroles plus stupides que jamais et une tentative jeuniste qui tombe totalement à plat. Passons sur "Stand Up Comedy" qui reprend la même idée en à peine plus soft et un poil plus funky. C'est juste à peine moins loupé.
Heureusement, Brian Eno, dont la patte était aux abonnés absents depuis "Magnificent", reprend les choses en main sur "Fez - Being Born". Une intro pleine de samples de voix et de percussions exotiques, puis une montée de guitare planante (inutile de noter encore une fois la présence de "oohooohoohooo", ils sont partout) et voilà le morceau qui poursuit sur ce train durant 5 minutes dont certaines sonorités ne sont pas sans rappeler le dernier Coldplay (produit par... Brian Eno !). On a ensuite droit à une ballade comme au bon vieux temps avec "White As Snow". Bien fait, un peu dégoulinant par moment, mais ça fonctionne pas si mal. C'est juste sans relief. Plat. "Breathe" se charge de nous faire reprendre de l'altitude et rappelle "City Of Blinding Lights" (du dernier album, How To Dismantle An Atomic Bomb), les guitares vrombissantes en plus. Un titre typique de U2, un de plus. Toujours bien fait, mais à force, les ficelles sur lesquelles le groupe tire finissent par devenir énormes et horriblement voyantes.
Finalement, c'est "Cedars Of Lebanon" qui se charge de mettre un point final à ce No Line On The Horizon (c'est censé signifier quoi au fait ?). Chant parlé/chanté et instrumentation assez minimaliste : nouvel auto-plagiat puisque ça ressemble étrangement à "New York" (titre présent sur All That You Can't Leave Behind), les refrains puissants en moins. Dommage, c'est ça qui était grisant.

Une nouvelle fois au final, c'est l'arnaque. On nous promet monts et merveilles, innovations, expérimentations et révolution musicale alors qu'en fait, on a là uniquement un album ampoulé par l'omniprésence écrasante de son chanteur et par une tendance générale du groupe à s'inspirer incessamment de ses réussites passées. Désolé les gars, Brian Eno peut pas tenir la baraque U2 à lui tout seul, surtout si vous ne le laissez pas faire plus que l'intro de vos morceaux.
C'est toute la différence entre No Line On The Horizon et l'album de Coldplay, Viva La Vida Or Death And All His Friends : on a d'un côté un groupe qui semble totalement fermé, cloisonné dans son passé musical brillant qu'il ne parvient plus à imiter et de l'autre, un (plus si) jeune groupe qui ne cesse de progresser et qui s'est totalement ouvert à ce qu'a pu lui apporter Brian Eno.

Verdict : 1,75/5

"Get On Your Boots" [LIVE]

Et pour se souvenir (avec nostalgie ou pas, c'est selon) de ce qu'était U2 auparavant :

"One" [LIVE]

Myspace